Patrick Bruel, La Fouine – le choc

patrick-fouinyÉvidemment, le but était d’attirer votre clic avec un titre bien générique et tout pété, le genre de ceux que vous croisez en ouvrant quotidiennement votre page Orange actu – une superbe source d’information sur le web, à l’heure où des milliards de sites spécialisés se chargent de parler précisément de ce que vous voulez, bande de pinces !

Non sinon, on y a eu droit sans préavis, sans que personne n’ait la décence de nous prévenir : Patrick Bruel, quinqua rincé jusqu’à la moelle (pour « quinquagénère » pas « quincaillerie »), a fait un duo avec le boss que le rap game français mérite : La Fouine. « Qu’est-ce que le fuck ? » nous sommes-nous demandés, tandis que se déroulait sous les yeux ébahis de l’Internet moderne un des plus gros ramassis public qu’il avait été donné de voir à la rédaction de Bravo Tonton.

Promis, on sombre pas dans l’analyse de clip relou. Il faut juste savoir qu’en 2013, les deux artistes ont décidé de parler des dangers des Interwebs pour les pauvres petits enfants qui, non contents de se faire voler leur goûter par Kévin, le gros dur de 14 ans resté coincé au CE2, se font aussi insulter sur le web pour « des petites phrases à la con« . Merci Patrick, ta lucidité sur les nouvelles technologies nous éclaire. On avait tous oublié à quel point il était difficile de tomber sur tout et n’importe quoi dans un champs aussi vaste que le net. Welcome back to 1999 enculé, ton modem Wanadoo 56k est en train de bloquer la ligne téléphonique pour trois bonnes heures de surf intense (qui dit « surfer sur le web » de nos jours ? Le prochain sondage de Bravo Tonton), maman tape à la porte de la chambre, elle doit recevoir un appel de Tata Béa. « Rien à foutre » penses-tu, « Pardon maman » réponds-tu. Big lol dans ton slip.

Instru dark ringarde, choré digne du Hit Machine pour émerveiller la ménagère – « Ils sont forts ces chinois ! »s’exclamerait Tata Béa, pendant que ta main fendrait l’air à la vitesse approximative de 60 à l’heure pour venir se heurter droit dans sa gueule – Bruel et son énorme balai dans le fondement commencent à « chanter » (rapper ? NON) avec une voix grave, en mode « Oh putain, la France va mal ». Et tout d’un coup, illumination ! Le texte savamment écrit suit les pas d’un bout d’chou qui va ramasser devant son ordi, dans la froideur cruelle et solitaire de sa chambre. Et Bruel de rajouter « Lève la tête, regarde-moi ! » Bah nique ta race ! Le gamin est en train de se faire insulter sur MSN (parallaxe temporel des années 90, là où cette chanson appartient en somme), et tu veux quoi ? qu’il tape « patrick bruel » sur Google Images pour « lever la tête » et te « regarder » ? Non mais tu t’es pris pour qui Patrick ? T’as cru que ta tronche de puceau représentait la dernière source d’espoir pour tous les ados mal dans leur peau ? T’es con ou quoi !? Non-sens majeur.

Néanmoins, l’apogée métaphysique de la collaboration est ailleurs. Non content de relativiser l’expertise délivrée par Kant et Sartre lors de leurs recherches avant-gardistes sur le moi social au sein de la vie en collectivité, ce morceau exceptionnellement moisi, de A à Z, des paroles à l’instru, du thème aux personnages qui l’interprètent, détient un moment-clé, une espèce de synergie entre les aspects visuels et sonores, un instant magique qui porte à lui seul tout l’intérêt d’une telle merde.

Alors on danse

France 2, dans sa grande tradition de gaspillage de redevance, a décidé il y a quelques jours (je sais plus quand et on s’en fout) de dédier une soirée entière à ce grand artiste de variété qui pue des pieds qu’est Patrick Bruel. Le taux de rincitude du personnage étant déjà sacrément élevé, la moindre chance d’attirer les jeunes ché-bran du Val d’Isère, était de caler ce fameux morceau, histoire de faire oublier qu’on avait encore une fois dépoussiérer ce pauvre Michel Drucker pour le remettre une (pas) ultime fois en route. Et là SURPRISE, passé les 2 premiers tiers des quelques minutes les plus longues de votre existence, il se lance…!

Usé par la vie, ne sachant plus sur quel pied danser, Patrick tente le hakka de la honte : après avoir checké très discrètement la troupe de danseurs formée par Kamel Ouali (?), il vole un ultime couplet à La Fouine et se lance dans un rap identitaire et sans concession, celui qui vous prend aux tripes pour vous faire réaliser que… non on déconne. C’est tout aussi pété que le reste, sauf que là, Patrick, avec son jean coupe droite et son pull en cachemire Zara, marche comme un crabe de long en large de la scène en lançant le fameux vers « Moi quand j’étais p’tit on avait pas d’ordinateur » (dans le texte). Au bout du rouleau, délaissé, il aurait sûrement accepté de sucer un éléphant en string s’il savait que ça allait créer le « buzz » autour de son personnage resté bloqué dans une faille temporelle aux alentours de 1986. Au lieu de ça, il rappe en tenue de papa, débitant des paroles d’une connerie sans nom tout en effectuant des pas de danse que n’aurait pas renié ma bite – quand on la secoue devant un miroir c’est trop drôle. Il conclut la « prestation » sur un air grave, checkant une Fouine morte écrasée par le semi-remorque de la gêne et, cerise sur le château, conclue le bordel par un petit saut nerveux, comme s’il s’était subitement fait caca dessus en se disant « J’ai calé un rap de malade ça mérite bien un petit saut de la vic… OH NON ! Mon 501 coupe droite acheté au Carrefour Montargis ! »

Une réal’ France Télévisions, à la pointe du bon goût, qui vous fera sûrement dire « Bravo Tonton ». Si t’as aimé ce que t’as lu, ou si comme 90% des bâtards qui viendront ici t’as lu 2 lignes en te disant « LOL mais non en fait », on t’autorise à faire semblant d’avoir été intéressé par l’événement culturel français du siècle, en t’invitant à partager cet article sur ta page MySpace, ou en profitant de notre super playlist sur Napster (tu peux même la partager illégalement avec le monde entier via KaZaA). Sur ce, nous prenons la poudre de perlimpinpin.